LA CONFIANCE EN SOI (2)
Les
premiers liens nous imprègnent (ou non) d'une confiance
primitive en la vie, sur laquelle se grefferont les bases de toute
expérience à venir. Au-delà de la satisfaction
des besoins, c'est à partir de la qualité de
l'attention reçue que se constitue le ciment de sa résistance
future aux épreuves.
Choyé, un enfant aura plus de
chance de développer une force qui le rassurera lorsqu'il se
trouvera seul. Mais hyper protégé, n'ayant pu
développer ses propres défenses, il ne serait pas pour
autant à bonne école. Autant l'attache qui nourrit de
force intérieure est indispensable autant, une fois inscrites
dans la mémoire les traces de cet attachement sécuritaire,
l'enfant doit éprouver seul cette force intérieure, et
nouer des relations vers d'autres ports d'attaches.
Pour
le tout petit, qui découvre son image dans le regard de sa
mère ou le reflet que lui renvoie un miroir, il est naturel
qu'il s'y accroche, mais à mesure qu'il tend vers l'âge
adulte, il est lui vital de s'en écarter. En effet, le regard
aimant d'une mère nous confirme, mais trop admiratif, il nous
aliène et entraverait l'accès à l'autonomie.
L'objet
transitionnel de Winnicott s'il est accepté et respecté
par l'adulte peut faciliter ce détachement et permettre à
l'enfant de poser les bases d'une confiance en soi en lui apportant
dès le départ un espace potentiel, au sein duquel il se
trouve et se retrouve, se créer et se récréer.
Un champ d'expériences neutre qui n'aura été ni
contesté ni troublé par des ondes négatives et
dont les traces mnésiques le guideront de façon
positive.
Que
nous nous soyons vécu lésé trahi ou abusé
dans la petite enfance, certains comportements dictatoriaux ou
perfectionnistes sont la manifestation compensatrice d'un manque de
confiance, tout comme les coups physiques sont un aveu de faiblesse
qui s'ignore…
Nécessaire pour féconder les germes de
la confiance en soi, le narcissisme enfantin ancre dans la vie et
toute expérience heureuse renforce le sentiment de sécurité
; bien entouré un enfant se sentira plus sûr qu'un
autre, mais une trop grande assurance à travers le déploiement
de forces héroïques disproportionnées en regard de
l'âge, ou une excellence scolaire, allergique à la
moindre baisse de niveau, pourraient dissimuler une inquiétude
profonde ou tendre en fait à rassurer un parent insatiable,
dont le propre sentiment d'insécurité exercerait une
demande implicite mais autoritaire de réparation ou de
valorisation.
Notre
comportement agit comme modèle au niveau de l'inconscient.
L'enfant a besoin d'être porté, rassuré ; savoir
qu'il peut se reposer sur plus fort que lui pour gagner peu à
peu ces forces qu'il ne songera bientôt plus à mesurer à
celles de ses parents mais à celles de ses semblables le
conforte. Ne pas limiter une volonté de puissance spontanée
qui l'inciterait à un sentiment de supériorité
sur sa mère ou sur son père, pour compenser une
infériorité naturelle, le plongerait dans l'insécurité.
Écho, au présent, de sa généalogie et du
futur dans lequel il se projette, le soi est aussi la famille au sein
de laquelle l'enfant se développe. Il doit pouvoir compter sur
ses parents et non les dominer.
Quel que soit l'amour qu'il lui porte, tout parent est amené à contrecarrer le moi grandissant de son enfant. S'il a confiance en ses actes, en la légitimité de son opposition, aussi sévère semble-t-elle, il communique à son enfant, en même temps que l'esprit des lois, un sentiment d'accord avec soi-même qui l'autorise à heurter la sensibilité de l'enfant pour mieux l'assurer à l'avenir. Autant le contredire par plaisir serait néfaste, autant lui tenir tête pour transmettre l'idée de la vérité d'une éducation en dépit de certains de ses aspects rébarbatifs est stimulant.